mercredi 9 mai 2012

Un hollandais fait le printemps – 25 mars 2012

Si je vous dis : caravane, vélo, nez homard et sandales, vous me dites ?
Tour de France ! Ah oui, c’est vrai aussi.
Non, moi je pensais plutôt aux hollandais.

Dans le Sud de la France, dès qu’on se met à rouler à 50 sur la nationale, avant même d’avoir pu remarquer le rose des amandiers, sans avoir eu le temps de sortir les chaises longues, on sait que le printemps est là, et avec lui, son lot de touristes hollandais, spécialistes d’opérations escargots.
Aujourd’hui, je vis aux Pays-Bas. Non, pas à côté de Biarritz. « Bas » j’ai dit, pas « Basque ». En Hollande ! Les français fantasment la Hollande comme le pays de l’euthanasie à tout va, de prostituées dans les vitrines à chaque coin de rue et de la drogue - même dure - disponible au supermarché. J’exagère… à peine. Je suis toujours étonnée par cette dichotomie entre l’image qu’on a de ce pays et ce qu’il est, et entre l’image du pays et l’image de sa population.
Objectivement, les néerlandais que vous croisez en France, au camping par exemple ou à la boulangerie – « deux baguettes chilfouplai. Merchi. Bonchour » - du haut de leurs au moins mètre quatre-vingt autant pour les mâles que pour les femelles, avec leurs bermudas, leurs peaux cramoisies comme si la crème solaire n’avait jamais été inventée, leurs polos rayés et leurs hordes (minimum 3) de gamins hurlant et remuant vous donnent quelle impression ?
Ils semblent juste hyper enthousiastes quant à la météo. On est d’accord.
En Provence, les vestes d’hiver ne sont pas encore au grenier, ils se baladent déjà en claquettes.
Et je vous rassure, ici, je veux dire chez eux, aux Pays-Bas, c’est pareil. Au premier rayon de soleil, les peaux livides sont offertes à l’œil et les doigts de pied prennent l’air. Et je n’ai jamais vu autant de cabriolet que depuis que je vis aux Pays-Bas. Avril ne te découvre pas d’un fil… connaissent pas. Alors mars…Ils vivent le soleil dans l’instant. Car c’est une denrée rare. Enfin, c’est ce qui se dit. Franchement, bien sûr qu’il pleut (beaucoup) plus qu’en Provence, mais depuis que je me suis réinstallée aux Pays-Bas , il y a cinq ans, j’ai vécu de bons moments de chaleur et de beau temps. Je dois probablement dire un grand merci à tous les pollueurs consommateurs que nous sommes sans lesquels le réchauffement de la planète n’aurait pas été possible, mais je m’éloigne du sujet.
Je disais donc les néerlandais vivent le soleil dans l’instant, les jardins sentent immédiatement la grillade, le marchand de glace fait retentir son carillon le soir venu. Nous, avec l’homme, on a déménagé le barbecue en rentrant de Provence. Il a d’ailleurs été le dernier à être mis dans le camion. Notre dernier barbecue date de ce jour-là. De la France. Depuis ? Et bien tout d’abord, il nous faut intégrer l’idée qu’il fait beau. On se dit qu’on pourrait peut-être faire un barbecue. Puis quand on s’habitue à l’idée du beau temps, alors on commence à envisager de le nettoyer. Et quand on est sur le point de peut-être passer à la phase nettoyage, il pleut. On ne maîtrise pas encore la réactivité hollandaise. L’homme a beau être batave, 5 ans en Provence lui ont laissé des séquelles. Par exemple, il met de la crème solaire. Si, si, je vous assure.
Les néerlandais et le soleil, c’est aussi une histoire d’amour. Et quand il ne le trouve pas chez eux, ils vont le chercher là où il se trouve. Au Sud.
Avez-vous observé les terrasses de Provence en Juillet : à l’ombre, les locaux, au soleil, les hollandais. Il est TRES important pour eux de rentrer bronzés. Nous, on appelle cela « carbonisés », mais pour eux, c’est synonyme de « bonnes vacances ». Le jour de la reprise, si après avoir scruté la couleur de peau, les collègues concluent le récit des vacances par un «en tout cas, tu as eu beau temps, qu’est ce que tu es bronzé(e) », alors le test est réussi. Ne croyez pas que c’est féminin. Je ne travaille presque qu’avec des hommes. Et j’ai d’ailleurs créé une tendance assez amusante au bureau : la fausse modestie. On en est les spécialistes, nous les françaises. C’est l’art du « ça te plait ? Merci ! Tu sais c’est une babiole à 5€ de chez H&M ». Il y a 3 ans, nous sommes partis 2 semaines en Sardaigne au mois de juin. Je suis brune aux yeux marron et je crains moins les coups de soleil que le vieillissement cutanée. J’ai donc passé mon temps à me tartiner de facteur 30 sur le corps et de facteur 50 sur le visage. Je suis malgré tout rentrée bien – bien bronzée. Il va de soit que j’ai passé l’examen avec succès, haut la main, et j’ai usé de la fausse modestie « et je me suis en permanence tartinée de facteur 30 ». Depuis, à chaque retour de vacances, j’entends mes collègues, pas du genre garçon coiffeur, plutôt genre « geek », reprendre mon fameux « …facteur 30 ». Les menteurs ! J’adore !

Bon allez, c’est pas le tout, je discute, je discute, mais avec le beau temps qu’il fait, je vais aller me faire griller dans le jardin, sinon lundi, on ne va pas vouloir croire que j’ai passé un bon week-end.
   

jeudi 3 mai 2012

La soupente - 15 mars 2012

Tout a commencé par un traumatisme crânien. Enfin, un léger traumatisme crânien, soyons honnêtes. Mais un trauma crânien quand même. Rien de moins.

En effet, un dimanche matin de mars, traînant des mois de fatigue et des semaines de nez dans le cul, alors que j’allais faire ma valise pour rentrer chez moi, aux Pays-Bas, après un week-end en France auprès d’une grande tante seule et malade, je me suis cognée la tête.
La vérité, c’est que je me suis explosée la tête, mais je ne veux pas tout de suite exposer mes tendances à l’exagération de fille du Sud. Donc, on reprend ; je me suis cognée la tête. Contre une soupente.
Oui, là, je sais, je suis carrément ridicule. Tant pis. J’assume.
Je vous passe les détails de l’homme courant sous mes ordres super clairs ;
-          « rose » traduction : « donne-moi le tube de crème à l’arnica qui se trouve dans la trousse de toilette rangée dans le meuble de salle de bain »
-          « noir et jaune » traduction : « putain je saigne, laisse tomber l’arnica et aboule la trousse noir et jaune qui se trouve dans le sac à langer posé à côté du canapé en bas dans le salon pour récupérer désinfectant et compresses »
-          « sucre » traduction : « j’ai vu du sang, je suis en train de tourner de l’œil, envoie le sucre que tu trouveras dans un carton (je vous rappelle que nous étions sur le départ) en bas dans la cuisine ».
Jusque là, la situation était sous contrôle.
Les dents serrées, j’ai fini les préparatifs, fait 5 heures de route (sans appuyer la tête sur le bien nommé « appui-tête » mais en me retournant minimum 40 fois pour ramasser le doudou, donner à boire, re-ramasser le doudou, faire coucou, re-re-ramasser le doudou, donner à manger, re-re-re-ramasser le doudou) et je me suis convaincue que mon mal de cœur était le mal des transports et mes maux de tête étaient dus aux émotions du week-end en compagnie de la grande tante.

Lundi matin, j’étais sur le point d’avaler deux paracétamols avec mon sucre au café (non, il n’y a pas de faute de frappe) avant de partir bosser, lorsque l’homme m’a demandé si je pensais aller travailler dans cet état.
Quel état ?
Il m’affirmait que je n’avais pas l’air, enfin qu’il me voyait là… bref, je ne pouvais pas aller bosser dans cet état.
Quelques coups de fil plus tard, assise face à mon calme puisque batave docteur, le verdict tombait : léger traumatisme crânien.
Autant certaines personnes sont hypocondriaques, et bien moi, c’est le contraire, je refuse de voir que je suis malade. J’ai donc reçu la nouvelle avec la même distance que le jour où une légère toux depuis quelques semaines s’avérait être une pneumonie, et un genou vaguement douloureux mais super gonflé après une chute de ski, une fracture du plateau du tibia.
Tellement peu consciente du sérieux de la situation, j’ai même demandé – connement n’ayons pas peur du mot – si je pouvais aller courir. Avec sa patience habituelle, le généraliste m’a fait comprendre qu’il fallait attendre la disparition de tous mes symptômes pour reprendre l’entraînement. Derrière son professionnalisme, je pense qu’il m’a cataloguée directos « cinglée ». En même temps, à mon corps défendant, n’oublions pas que je m’étais pris 24 heures plus tôt un sacré pète au casque.

Une fois réglée la logistique (vidage d’agenda, remplissage de frigo, gardage des enfants) me voilà enfin sur mon canapé, avec mes 3 téléphones, mon thé vert, ma bouteille d’eau et mes 5 télécommandes.
Tout d’abord, les télécommandes ne sont venues qu’envahir ma charmante mais minuscule table basse. La télé et la musique m’étaient insupportables.
L’homme a ensuite échappé de justesse à un homicide ; voulant bien faire, il me donnait des coups de marteau sur la tête. Traduire : il remplissait le lave-vaisselle.
Enfin seule, j’ai démonté le réveil dont le tic-tac m ‘agressait et j’ai enfin pu profiter du doux chant d’un merle bavard.

Pas longtemps.
Non pas que j’ai voulu lui aussi lui démonter les piles ou l’étrangler. C’est plutôt qu’un mot venait me harceler : Pourquoi ? Poooouuuuurquoioioioi ? Pourquoi ?
Pourquoi me suis-je cognée la tête ? Pourquoi maintenant ? Pourquoi mon inconscient m’envoie t’il des signes ?
Vous pouvez rigoler, mais dans ce genre de situation, j’oublie mon côté cartésien et je crois au psy-cho-so-ma-tique. Je crois que le corps parle. J’ai réfléchi un peu. Histoire de. Mais j’ai rapidement arrêté de faire mon intéressante (je n’avais de toute manière pas de public) et j’ai écouté. J’ai entendu un nouvel appel du stylo. Mon corps me demandait plus de nourriture culturelle, plus de lecture, plus d’écriture. Tout de suite, maintenant, il voulait bouffer des mots et du papier.
J’ai décidé de l’écouter.

Alors à côté d’une dizaine de nouvelles qui attendent une dizaine de copines pour pouvoir s’appeler un recueil et d’un roman sur lequel je travaille depuis presqu’une année et qui avance à une lenteur désespérante, j’ai envie aussi de partager dans l’immédiateté mes pensées et mes expériences d’expatriée  aux Pays-Bas. J’ai envie de parler de ces deux cultures que j’aime : la française et la néerlandaise.

D’où l’ouverture aujourd’hui de ce blog.
Tout ça à cause d’une soupente.